Inauguration du second laboratoire commun entre l’entreprise japonaise Hitachi High-Tech Corporation et le CNRS

Communiqué de presse Physique

Le CNRS et Hitachi High-Tech Corporation renouvèlent leur coopération afin d’exploiter le potentiel d’un instrument unique au monde pour étudier les nanomatériaux avec une très grande précision, à la fois dans l’espace et dans le temps. Cet objectif partagé sera réalisé dans le cadre d’un nouveau laboratoire commun appelé HC-IUMI2 (Hitachi-CNRS Infrastructure for Ultrafast MIcroscopy), prolongement d’un premier « Labcom » créé en 2018. Grâce à la collaboration entre l’industriel japonais et le Centre d’élaboration de matériaux et d’études structurales (CEMES‑CNRS), aux expertises mondialement reconnues, cette infrastructure ouvre des perspectives fascinantes pour l’exploration et le contrôle de la matière condensée.

Photographie de la colonne du microscope électronique en transmission ultrarapide développé dans le cadre de ce laboratoire commun
Photographie de la colonne du microscope électronique en transmission ultrarapide développé dans le cadre de ce laboratoire commun
© Frédéric MALIGNE / CEMES / CNRS Images

Depuis leur invention en 1931, les microscopes électroniques en transmission (MET) ont permis des avancées spectaculaires en physique, chimie et biologie. Dotés d’une bien meilleure résolution spatiale que les microscopes optiques, ils sont capables à l’aide d’un faisceau d’électrons de « prendre des photos » très détaillées d’objets aussi petits que des virus ou des nano-objets1 .

Cependant, ils ne peuvent pas suivre l’évolution de phénomènes qui se produisent à des échelles de temps extrêmement rapides, telles que la picoseconde (un millionième de millionième de seconde) ou la femtoseconde (un millionième de milliardième de seconde). Or, de nombreux phénomènes physiques qui gouvernent les propriétés des nanomatériaux se produisent justement à ces échelles de temps.

L’observation de ces phénomènes rapides exige donc une stratégie différente et des développements instrumentaux importants. Ces derniers, initiés à la fin des années 1970 se sont accélérés depuis une quinzaine d’années et ont abouti au développement de microscopes électroniques en transmission ultrarapides (UTEM).

Cette nouvelle catégorie d’instruments combine la résolution spatiale des microscopes électroniques et la résolution temporelle des sources laser femtosecondes. Les UTEM sont basés sur une expérience « pompe‑sonde ». L'échantillon est excité par une première impulsion laser appelée « pompe ». Une seconde impulsion laser va stimuler l’émission d’un paquet d’électrons « sonde » qui permet d'obtenir une image, un cliché de diffraction ou un spectre d'énergie des électrons.

Les scientifiques du CEMES-CNRS ont développé depuis une dizaine d’années une technologie d‘UTEM qui repose sur une source d’électrons ultrarapide unique au monde. Plusieurs résultats très prometteurs obtenus sur un premier prototype ont motivé la création d’un premier laboratoire commun de recherche international entre le CNRS et Hitachi High-Tech Corporation (HHT), entre 2018 et 2023. L’objectif du premier laboratoire commun était de transférer la technologie mise au point sur un prototype par les équipes du CEMES-CNRS vers un microscope moderne de l’entreprise Hitachi High-Tech Corporation. Cet objectif a été atteint en 2023.

Les composants électroniques qui manipulent ou stockent aujourd’hui l’information dans nos smartphones ont des dimensions toujours plus petites et des cadences de fonctionnement de plus en plus élevées. L’étude des propriétés de ces nano-composants électroniques, le retournement de l'aimantation d'un domaine magnétique d'un disque dur ou les vibrations mécaniques de nano-objets nécessite donc des instruments comme celui développé dans le cadre de ce laboratoire commun. « Le développement de la microscopie électronique ultrarapide permet des avancées dans le domaine de la science des matériaux, y compris pour des applications essentielles. Le microscope développé conjointement entre le CEMES-CNRS et HHT permet d'explorer la matière avec une précision inégalée. », résume Thierry Dauxois, directeur de CNRS Physique.

« Dans le domaine de la microscopie électronique en transmission ultrarapide qui permet de visualiser des phénomènes physiques ultra rapides, j’espère que les compétences réunies au sein de ce nouveau Laboratoire commun, par le CEMES-CNRS et Hitachi High-Tech Corporation, apporteront à la fois de nouvelles connaissances et de nouvelles technologies », déclare Toshihide Agemura, Manager of Beam Technology & Analytical Systems Product Division, Hitachi High Corporation.

Fort du succès du premier laboratoire commun et afin d’aller plus loin dans la recherche et l'innovation, le CNRS et HHT ont décidé de poursuivre cette aventure scientifique et technique sur la période 2023-2028, afin de démontrer le potentiel du nouvel instrument dans plusieurs domaines à la pointe de la physique des matériaux. Les scientifiques toulousains et toulousaines souhaitent ainsi exploiter les capacités uniques de cet instrument pour étudier la dynamique des porteurs de charge dans les nanostructures semiconductrices, la réponse optique, les propriétés mécaniques ou la dynamique de l’aimantation dans des objets de dimensions nanométriques.

Le CEMES-CNRS et les développements instrumentaux : une longue histoire

Créé en 1957 pour développer la microscopie électronique en transmission, le Laboratoire d'optique électronique (LOE) de Toulouse et son emblématique Boule de 25 mètres de diamètre, est devenu en 1988 le CEMES-CNRS, un centre d’excellence pour la recherche sur les matériaux, nanomatériaux et nanomachines moléculaires. Au-delà de la microscopie électronique, le laboratoire dispose d'un parc instrumental unique et performant, permettant des observations et des mesures aux échelles ultimes par diverses techniques expérimentales. Il possède également un ensemble de techniques (chimie de synthèse, nanotechnologies) pour fabriquer des objets originaux à l'échelle du nanomètre ainsi qu’une forte capacité à mener des activités de modélisation. Plus de 60 ans après la création du LOE, le Centre d’élaboration de matériaux et d’études structurales est toujours à l’avant-garde du développement d’instruments scientifiques uniques au monde, au premier rang desquels figurent plusieurs microscopes électroniques.

  • 1Le terme nano-objet décrit un matériau dont au moins une dimension externe est à l’échelle nanométrique (un milliardième de mètre)

Contact

Arnaud Arbouet
Chercheur CNRS au Centre d'élaboration de matériaux et d'études structurales du CNRS (CEMES)
Simon Leveque
Chargé de communication - attaché de presse CNRS Occitanie Ouest
Yoshifumi Taniguchi
Presse Hitachi