Les australopithèques d’Afrique du Sud sont plus vieux qu’on ne le pensait
Les Australopithecus africanus auraient vécu au moins un million d’années plus tôt que ce que pouvaient indiquer les précédentes datations. C’est du moins ce que révèle l’étude de l'âge de remplissage d'une grotte en Afrique du Sud appartenant au site de Sterkfontein, un des plus riches en restes d’australopithèques où a notamment été découvert en 1947 le fossile de Mrs Ples, un des premiers crânes complets de ce genre d’hominines. La zone avait précédemment été datée entre 2,1 et 2,6 millions d'années, mais cette date était celle de sédiments intrusifs, s’étant mis en place dans la formation fossilifère après sa constitution. Ici, grâce à un travail de stratigraphie puis à la méthode de datation par les isotopes cosmogéniques1 l’équipe internationale dont fait partie Laurent Bruxelles, chercheur CNRS au laboratoire Travaux et recherches archéologiques sur les cultures, les espaces et les sociétés2 , a montré que les roches de cette grotte ont été enterrées avec les fossiles il y a 3,4 à 3,6 millions d’années.
Ce résultat repousse l’âge des Australopithecus africanus tels que Mrs Ples à une époque similaire à celle d’Australopithecus afarensis d’Afrique de l’Est, contredisant ainsi l’idée selon laquelle les premiers descendraient des seconds. Mieux, si on la compare à un fossile d’A. afarensis célèbre, Mrs Ples serait même plus « âgée » que Lucy. Publiés dans PNAS la semaine du 27 juin 2022, ces résultats invitent à ne plus considérer l’Afrique de l’Est comme seul « berceau de l’humanité », mais à repenser cette notion à l’échelle du continent, en y intégrant notamment l’Afrique australe.
Cosmogenic nuclide dating of Australopithecus at Sterkfontein, South Africa. Darryl E. Granger, Dominic Stratford, Laurent Bruxelles, Ryan J. Gibbon, Ronald J. Clarke et Kathleen Kuman. PNAS, la semaine du 27 juin 2022.
- 1Cette méthode de datation absolue est utilisée pour déterminer la durée d’exposition d’une roche aux rayonnements cosmiques : lorsqu'une roche est exposée aux rayons cosmiques, des isotopes dits cosmogéniques sont produits et s'accumulent le temps que la roche reste en surface. Ils décroissent de manière différentielle si certains blocs tombent dans des grottes, alors en partie protégés de ces rayonnements. Pour ces travaux, les scientifiques ont mesuré le rapport entre les isotopes du béryllium 10 et de l'aluminium 26.
- 2TRACES - CNRS / Ministère de la culture / UT2J