Les réseaux complexes réinterprètent les quatuors de Beethoven
Une base de données recensant exhaustivement la succession des accords de tous les quatuors de Beethoven a permis leur analyse à la lumière d’outils développés pour la compréhension de l’architecture et l’exploration de grands réseaux contemporains, comme le Web, les écosystèmes, ou encore les interactions au sein de groupes sociaux. Ce travail, mené par des scientifiques du Laboratoire de physique théorique1 et du Laboratoire de physique théorique et modèles statistiques2 , est publié dans The European Physical Journal B.
La théorie des réseaux a permis de comprendre comment se structurent divers systèmes complexes tels que les interactions proies-prédateurs dans un écosystème ou l’organisation du Web. Elle a ainsi établi des lois universelles relatives aux propriétés statistiques de différents systèmes physiques, éclairant les mécanismes sous-jacents à leur formation et à leur dynamique. Cette approche a par exemple été appliquée avec succès aux réseaux linguistiques issus de textes ou de dictionnaires.
Le corpus musical, qui a certaines similarités avec le langage, a fait l'objet de nombreuses études en lien avec la physique ou les mathématiques : traitement automatisé de l'analyse harmonique, analyse statistique, applications de l'intelligence artificielle... Mais il n'avait pas été jusque-là considéré du point de vue de la théorie des réseaux, alors que les différents éléments harmoniques d’une partition, se succédant selon une « grammaire » qui définit le style musical, ont une interaction de fait et ressortissent à une analyse de réseau. Alors que l'analyse statistique se borne à considérer les accords isolés (ou par paires ou triplets), cette approche permet donc de considérer le texte musical dans sa totalité et d'analyser les relations entre accords à une échelle plus globale.