Contrer l’antibiorésistance

CNRS le journal Biologie

La multiplication de résistances aux traitements contre les infections menace la santé humaine. Pour faire face, les scientifiques traquent l’apparition et la diffusion des déterminants génétiques qui arment les pathogènes contre les antibiotiques, et multiplient les innovations en matière de stratégies thérapeutiques et de prévention.

IPBS
Cette affiche à destination du grand public rappelle que les antibiotiques ne sont pas efficaces contre les maladies virales telles que la bronchite (campagne nationale, Santé publique France, 2022).

© Santé publique France

Le constat est unanime : si rien n’est fait, la résistance des pathogènes aux agents antimicrobiens pourrait devenir la première cause de mortalité dans le monde à l’horizon 2050. Comme l’affirmait l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dès 2015, le phénomène « représente un immense danger pour la santé mondiale » pouvant conduire à une « ère post-antibiotique dans laquelle les infections courantes pourront recommencer à tuer ». Comme un retour à l’époque d’avant la découverte de la pénicilline… Conscients du danger, les scientifiques du monde entier ont pris le problème à bras-le-corps. Biologistes et chimistes sont en première ligne et, avec eux, les experts du CNRS et de ses partenaires.

L’acquisition de résistances aux antimicrobiens, des médicaments utilisés pour prévenir et traiter les infections, est un phénomène évolutif naturel. Au cours du temps, les pathogènes évoluent, la sélection naturelle favorisant les micro-organismes les mieux adaptés à leur environnement, ici en les rendant insensibles aux médicaments auxquels ils sont exposés. Rien que ces dernières décennies, une utilisation parfois abusive et excessive des antibiotiques a fait prendre au phénomène une tournure nous plaçant dans une situation critique.

Concrètement, on observe désormais un taux élevé de résistance pour des infections bactériennes courantes. Avec des cas de propagation mondiale rapide de pathogènes dits « multi-résistants » qui, pour certains d’entre-eux, ne peuvent tout simplement plus être traités via les traitements existants. Alors que depuis près d’un siècle l’essor des antibiotiques nous avait laissé croire que le risque infectieux était sous contrôle, nous sommes tenus de réapprendre dans l’urgence que la lutte contre les infections ne peut être que sans relâche. Elle implique une compréhension fine des processus par lesquels un microbe acquiert des résistances, comment celles-ci se diffusent, et demande une innovation permanente en matière de conception de diagnostics, de molécules antimicrobiennes et de définition de stratégies thérapeutiques.

Comprendre les différentes causes de résistance

Comme l’explique Olivier Neyrolles, directeur de l’Institut de pharmacologie et de biologie structurale1 (IPBS) à Toulouse, « la résistance d’un pathogène à un antimicrobien peut avoir différentes origines. Elle peut être liée à une mutation de la cible qui n’est alors plus reconnue par le médicament, ou bien à une modification d’une enzyme nécessaire à l’activation de ce dernier. Parfois c’est la membrane du pathogène qui est rendue imperméable aux médicaments ou alors c’est la capacité du pathogène à excréter le médicament qui est accrue. »

  • 1Tutelles : CNRS, UT3